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AEGIS European Conference on African Studies
11 - 14 July 2007 African Studies Centre, Leiden, The Netherlands
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L’insaisissable sacralité des souverains chrétiens de Nubie (VIIIe-XIVe siècles)
Panel |
22. Retour sur les monarchies sacrées en Afrique
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Paper ID | 368 |
Author(s) |
Seignobos, Robin
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Paper |
No paper submitted
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Abstract | L’appréciation de la monarchie nubienne et de son idéologie à l’époque chrétienne (VIe-XIVe s.) est fortement conditionnée par les spécificités de la documentation afférente. Le point de vue nubien y est, en effet, mal représenté puisque aucun récit historique endogène suivi ne nous est parvenu.
1. Les mirages des sources arabes
L’essentiel du corpus écrit relatif à la Nubie médiévale provient des auteurs arabes chrétiens et musulmans. Or, dans ces récits se mêlent parfois à la méconnaissance des réalités de ces régions des desseins littéraires ou idéologiques. Certaines sources musulmanes font ainsi du roi de Nubie un personnage quasi imaginaire modelé dans une finalité précise. Il devient alors une figure de modestie et de sagesse pour mettre en valeur les errances de certains dissidents ou bien un repoussoir qui permet de dénier toute puissance et toute légitimité à son peuple, infidèle et ennemi potentiel de l’Islam.
À l’inverse, il est présenté chez certains écrivains coptes comme un personnage « sursacralisé » dans lequel se fondent les espoirs terrestres et les attentes eschatologiques des Chrétiens égyptiens.
2. Royauté sacrée ou monarchie de droit divin ?
Commune aux ethnologues africanistes et aux médiévistes de l’Occident et de l’Orient chrétien, l’expression de « royauté sacrée » recouvre néanmoins des notions bien distinctes. La Nubie par sa situation géographique se trouve pourtant à la frontière de ces deux traditions scientifiques.
Il faut pourtant bien concéder que l’on peine à apercevoir clairement dans la documentation nubienne les traces d’une royauté sacrée au sens strictement frazerien du terme (régicide, inceste royal…). L’idéologie royale puise avant tout dans le répertoire culturel chrétien et prend modèle sur l’empereur byzantin. Pour autant, si l’on ne peut sans ambiguïté reconnaître dans le souverain nubien l’ « idéal type » du roi divin, il serait tout aussi faux d’en faire un simple calque de son inspirateur constantinopolitain.
3. L’archétype byzantin et son adaptation locale.
L’idée que le pouvoir du souverain procède, à l’instar des monarchies européennes et byzantine, de l’élection divine est notamment illustrée par les titulatures royales et de façon plus spectaculaire par le portrait royal découvert il y a quelques années dans un monastère de Dongola, capitale du royaume de Makuria. Le souverain vêtu d’un manteau orné du symbole impérial de l’aigle y est représenté recevant de la Trinité personnifiée les insignes de sa fonction. L’art nubien a retenu de l’art byzantin la pompe et les symboles impériaux tout en tenant compte de la tradition religieuse locale d’inspiration copte selon laquelle la consubstantialité des trois personnes divines est pleinement assumée à la différence du dogme byzantin.
La spécificité des modes de représentation des tenants du pouvoir en Nubie réside surtout dans l’obsession des artistes et de leurs commanditaires pour l’association systématique des personnages publics avec des figures saintes. Chaque portrait est conçu comme une mise en scène de la familiarité des rois avec le divin. Ces portraits agissent comme un rappel de leur présence et justifient aux yeux des fidèles et des sujets la charge qu’ils détiennent.
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